Zelkova crenata
Quel est cet arbre au nom bizarre
à consonance latine ? Présent sur le territoire de la commune de Cheverny, il
n’est pas autochtone de la région, ni même de France. Il nous vient des confins
du Caucase et de Sibérie, d’où son nom commun : « orme de Sibérie ». D’après
les spécialistes, il aurait été introduit d’abord en Angleterre, vers la fin du
XVIIIe siècle puis, quelques temps plus tard, en France par
le botaniste André Michaux. Planté tout d’abord dans les parcs royaux dans un but
ornemental, il migra ensuite, comme la plupart des arbres exotiques, dans les
parcs et propriétés privées des provinces.
Comment est-il arrivé en forêt de Cheverny ?
Probablement par le souhait du
propriétaire des lieux, ou par un botaniste précurseur, voire même par un
forestier curieux des nouveautés. Il peut aussi être arrivé par l’intermédiaire
d’un oiseau qui aurait ingéré quelques drupes, « ses fruits », et déposé les graines
en cet endroit. Toujours est-il que j’ai découvert cet arbre lors de mes études
botaniques en 1971.
Le sujet initial, d’un diamètre d’environ 25 cm était alors
installé sur la crête du talus. Aujourd’hui, ce spécimen a disparu, sans doute
exploité lors d’une coupe du taillis ou disparu de mort naturelle. Cependant,
il a pu assurer sa descendance, soit par semis, soit par rejets ou par
drageonnement. Actuellement, une bonne quinzaine de spécimens de belle taille est
visible sur le bord de l’allée du Chêne des Dames. Installés sur la gauche, à
quelques centaines de mètres après le chemin de la Rousselière, à l’entrée de
l’ancienne sablière. Cet arbre est discret et peut être confondu avec le charme
quant à son port et à la forme de ses feuilles. Cependant, si on y regarde de plus
près, bien des différences sont visibles. Tout d’abord, ses feuilles crénelées,
d’où son nom, ensuite, la couleur gris verdâtre de son écorce. Par ailleurs,
celle-ci s’exfolie avec l’âge, comme pour le platane, laissant apparaître une
écorce orangée. Enfin, son port altier, bien plus élancé que le charme, présente
alors des hauteurs de premier ordre, surtout en peuplement dense.
Au vu de la
station où il s’est développé, il présente une adaptation assez remarquable quant
à la qualité du sol et supporte assez bien l’ombrage de ses voisins. Son bois,
peu connu des forestiers et des exploitants, pourrait être intéressant pour des
utilisations de petits volumes, sa croissance lente laisse supposer de bonnes
qualités technologiques. Il reste à découvrir la couleur et l’odeur de ses
fleurs et celles de ses fruits, mais pour cela, il nous faudra patienter
jusqu’au printemps et fin avril.
Michel Bourgeois
(1) Drageonnement : un drageon est une pousse issue de la racine d'un végétal qui peut devenir autonome et être replantée comme nouvel individu (https://www.futura-sciences.com).
(2) En botanique l'exfoliation est la perte des feuilles mais désigne aussi le détachement de l'écorce en couches minces (Wikipédia).
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Drageonnement |
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Exfoliation |
La Grenouille n°45 - Octobre 2019
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