Chouette, une chevêche !


Affalé les ailes en croix dans le carré de muguet, l’oiseau n’a pas fière allure. Il paraît épuisé et se laisse prendre sans difficultés. La silhouette ramassée, les ailes courtes,
la teinte générale marron clair, évoquaient un rapace nocturne. Surprise! C’est une jeune chevêche. La tête large et aplatie, les grands yeux jaune d’or ne laissent aucun doute. En cet après-midi de juin, tout laisse penser que nous avons trouvé ce jeune à l’arrivée d’un premier vol téméraire et un brin prématuré. L’insouciance des jeunes, leur curio­sité et leur intrépidité sont d’ailleurs bien connus pour valoir à cette espèce une de ses principales causes de mortalité.
Avec la forestière chouette hulotte et l’effraie, bien connue sous le terme de dame blanche, la chevêche d’Athéna est la troisième chouette à fréquenter nos communes, où elle demeure très dépendante de l’habitat humain pour nicher dans un trou de mur ou sous une faîtière.
Dépendante des hommes, elle l’est également pour ses lieux de chasse car il lui faut des espaces herbeux et ouverts où vivent insectes et campagnols qui font son ordinaire. La présence d’arbres qui permettent de guetter est appré­ciée. S’ils sont creux de surcroît et offrent des gîtes supplémentaires, tout va pour le mieux. Mais si les vieux vergers sont classiquement présentés comme le milieu optimum, on peut en réalité trouver cette sympathique petite chouette dans de multiples cas de figure, bien souvent à proximité immédiate de l’habitat humain.

Voici une trentaine d’années, la chevêche était devenue rare et même fort rare dans le département. Pour les naturalistes locaux, ce fut une surprise à la fin des années 90 que de la retrouver bien présente en cinq bastions départementaux, le plus proche étant le sec­teur de Chémery. Depuis, régulièrement et de façon assez spectaculaire, l’aire de distribution départementale s’accroît. On estime aujourd’hui à 500 couples l’effectif global du Loir-et-Cher. Si Cheverny et Cour-Cheverny ont vraisembla­blement été un temps totalement désertés, une très récente enquête de l’association Sologne Nature Environnement retrouve trois couples à Cheverny et cinq à Cour-Cheverny.
Mais probablement y en a-t-il d’autres. Car si les grands cris clairs et les ululements sont fréquents en fin d’hiver pour certains couples, d’autres, comme celui qui nichait chez moi cette année, sont étonamment discrets.

Alors si vous apercevez la chevêche perchée sur un bâtiment, l’arbre d’une cour ou un poteau téléphonique, faites en part à «La Grenouille,» elle refera les comptes. Son envol caractéristique vous aidera à la déterminer car il débute toujours par un plongeon vers le sol.

L’avenir de la chevêche d’Athéna apparaît incer­tain. Si l’espèce a su puiser dans ses ressources pour reconstituer ces dernières années une partie de sa population d’antan, la rénovation des bâtiments anciens reste pour elle, en élimi­nant ses possibilités de nidification, une menace sérieuse. Dans ces circonstances, laisser le trou sous la faîtière de pignon peut suffire à l’installa­tion d’un couple... La pose de nichoirs spécifiques peut aussi être le moyen de retenir cette espèce, et bien d’autres, et maintenir ainsi, à l’intérieur même de nos villages un minimum d’émotion, de mystère et d’émerveillement envers le vivant dont notre société a tant besoin.

Le Castor - La Grenouille n° 17 - Octobre 2012

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