Une colonie en formation à Cheverny

Bernard Sinet devant l'essaim de 15 000 à 20 000 abeilles - Cheverny
Bernard SInet devant l'essaim
de 15 000 à 20 000 abeilles

Bernard Sinet fait partager sa passion des abeilles aux lecteurs de La Grenouille devant un superbe essaim en formation. Comme il nous le précise : « Un essaim d’abeilles en formation au 15 avril est exceptionnel ! Il y a quelques années, on considérait que la formation d’une colonie début mai était précoce. Ce qui montre bien qu’il s’opère un réchauffement climatique ».

 Qu’est-ce qu’un essaim ?
Une colonie en formation à Cheverny - abeillesUn essaim est issu d’une forte ruche dans laquelle il n’y a plus assez de place. La vieille reine la quitte alors, suivie de la moitié des occupantes. L’essaim, désormais complètement indépendant, se regroupe non loin, à une trentaine de mètres, avec pour objectif de se fixer définitivement dans un endroit propice : un trou dans un mur, le creux d’un arbre, une cheminée... ou une autre ruche disponible à proximité. Quelques abeilles viennent en reconnaissance pour envisager le lieu. Si l’odeur leur convient, si l’exposition, le taux d’humidité et le volume leur paraissent conformes à leur attente, elles en avertissent alors leurs congénères. Des abeilles « nettoyeuses » (quelques dizaines), préparent la ruche en éliminant les salissures de toutes sortes. Elles opèrent un peu plus d’une semaine avant que l’essaim prenne possession de leur nouvel habitat. Les parois de la ruche sont tapissées de propolis (1) que les abeilles récoltent sur les bourgeons de peupliers au printemps. C’est un antiseptique très efficace qui leur sert aussi de ciment pour boucher des fissures. Puis les abeilles cirières ingurgitent du miel pour produire la cire qui sert à construire les alvéoles. L’essaimage se fait au printemps, début de la floraison qui permet de constituer les provisions d’hiver.

La vie de la ruche
La vie de la ruche s’organise autour de la reine qui pond l’équivalent de son poids par jour, soit 1 500 à 2 000 oeufs. Si une abeille « ordinaire » ne vit que 5 à 6 semaines, une reine peut vivre jusqu’à 5 ans, mais pond moins au delà de 3 ans, ce qui affaiblit d’autant la colonie. La population d’une ruche compte environ 50 000 à 80 000 individus.

Comment la ruche fabrique une reine
Une colonie en formation à Cheverny - abeillesAu départ, l’oeuf est le même que celui d’une abeille « ordinaire ». Mais les larves de reines se développent dans des alvéoles spéciales, verticales et plus longues que les autres alvéoles, afin de développer leurs organes génitaux. Les autres abeilles se développent dans des alvéoles horizontales plus petites qui atrophient leurs organes génitaux. Les reines, à l’état de larves, sont nourries exclusivement de gelée royale, une substance fabriquée par des glandes situées dans la tête des ouvrières les plus anciennes. Une ruche, dès le début de son essaimage et suivant sa force, va commencer par élever une dizaine de cellules royales. Quand la première petite reine naît, son premier travail est de supprimer les autres larves de reines potentielles. Si deux reines naissent en même temps, elles se battent à coups d’aiguillons, jusqu’à ce que l’une d’elle meure. La nature a prévu une autre caractéristique aux reines : leur aiguillon est lisse. Elles peuvent donc piquer sans que celui-ci ne reste dans le corps de leur victime. Une abeille ordinaire possède un aiguillon muni de crochets « en harpon » qui reste dans sa victime. De ce fait, l’abeille qui a piqué y laisse une partie de son abdomen et meurt. Quelques jours après sa naissance, la reine sort rapidement de la ruche, poursuivie par les mâles (bourdons). Les plus rapides s’accouplent avec elle. Elle regagne la ruche et entame sa carrière de pondeuse. Elle ne ressortira éventuellement que pour essaimer.

Le travail des abeilles
La vie de l’abeille n’est qu’une succession de fonctions à remplir au profit de la communauté. L’oeuf devient larve, puis nymphe. 15 jours après, l’abeille naît en brisant la capsule de cire qui la protégeait. L’abeille, à sa naissance, découvre la ruche pendant environ 48 heures. Elles est d’abord nourrice : elle s’occupe des bébés... Puis abeille cirière : elle ingurgite du miel pour produire la cire qui sert à construire les alvéoles. Devenue ouvrière, elle s’occupe du couvain. Elle part collecter le nectar destiné aux bébés qui sont nourris d’un mélange de miel, de pollen et d’une très petite quantité de gelée royale. Certaines abeilles deviennent gardiennes de la ruche à la fin de leur vie.

Une ruche sans reine peut-elle survivre ?
Il arrive qu’une ruche se retrouve sans reine. La population de la ruche orpheline va alors dépérir. Certaines abeilles vont alors se déclarer « ouvrières-pondeuses ». Mais leurs organes génitaux étant atrophiés, elles ne sont pas destinées à s’accoupler avec un bourdon. Leurs oeufs sont donc vierges et ne vont donner naissance qu’à des bourdons. Les abeilles les élèvent. Ils servent pour réchauffer le couvain. Quand ils ne sont plus utiles, vers le mois d’août, elles les sortent de la ruche et les tuent... ou ils s’enfuient. Pour autant, la ruche est condamnée par la nature s'il n'y a pas d'intervention de l'homme pour réintroduire une nouvelle reine ou des oeufs de moins de 36 heures prélevés dans une autre ruche. Il est possible d’introduire artificiellement une reine dans une ruche qui en est dépourvue. Enfermée dans une petite boîte, on la place sur le dessus des cadres de façon à ce qu’elle s’imprègne de l’odeur de la ruche. Quand on la lâche, les abeilles sont habituées à cette nouvelle reine qui dégage une odeur familière. Elles l’acceptent donc.

La réunion de deux essaims
Face à deux ruches faibles dont les essaims sont trop petits, on peut tenter de les réunir. On prépare une ruche vierge, sans odeur. On y place un drap parfumé sur lequel on déverse les abeilles des deux essaims qui s’imprègnent alors de la même odeur.

Le langage des abeilles
Quand une abeille trouve un endroit propice où butiner, elle revient à la ruche pour en avertir ses semblables. Elle exécute une danse pour leur indiquer l’endroit. La danse saccadée indique la distance et la danse en rond la position du soleil, de la ruche et de l’endroit digne d’intérêt. Leur langage se traduit aussi par des attitudes, une manière de voler ou de se dresser sur ses pattes qui peut être agressive face à un intrus... Si on tapote sur la ruche, la colonie émet un vrombissement sourd qui s’apparente à une alerte générale... Les abeilles, très sensibles aux odeurs (les phéromones qu’elles captent avec leurs antennes), peuvent réagir de façon agressive face à une personne dont elles sentent la peur...

Quelques ennemis des abeilles
Le varroa, un acarien parasite qui se colle sur le thorax des abeilles et les tue. Il rentre dans la ruche et tue aussi les couvains. Il existe aujourd’hui un traitement efficace. On peut citer aussi les frelons, les guêpes, les souris, les pics-verts et le Sphinx « Tête de mort », papillon de nuit à l’épaisse fourrure qui pénètre dans les ruches pour se délecter de miel...

(1) La propolis : matière végétale produite par les abeilles pour garantir l’asepsie de leur ruche, la propolis, pure ou liquide, est réputée depuis l’Antiquité pour ses effets bénéfiques dans le traitement et la prévention des affections respiratoires. Excellent immunostimulant, elle se révèle un antibiotique et un cicatrisant très actifs. 

Bernard Sinet - La Grenouille n°44 - Juillet 2019

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